Cooking2000 remercie la marque Liebig pour les informations présentes dans ce dossier.
Georges Carantino est historien de l'alimentation et ethnologue.
La soupe est un plat ancestral, plusieurs fois millénaire, pourtant il
semblerait qu'elle n'ait jamais été autant à la mode qu'aujourd'hui.
Peut-on parler d'un « phénomène » soupe ?
A l'évidence, notre époque redécouvre la soupe après une période de
désaffection. Il suffit de voir le nombre de livres de recettes publiés, d'articles
dans la presse féminine, le succès des soupes liquides vendues dans le
commerce… Ceci dit, même si la soupe s'était faite plus rare ces dernières
décennies sur nos tables, ce plat a toujours été très présent dans notre tradition
culinaire, car la soupe a une forte dimension identitaire avec ses multiples
formes régionales, telles que la garbure, la soupe au pistou.
Les relations de l'homme avec la soupe ont une riche histoire qui éclaire autant
la période de désaffection qu'a connue la soupe que sa renaissance. Le nombre
d'expression autour de la soupe illustre bien cette ambivalence :s'il est évident
pour tous que l'on « vit de bonnes soupes et non de beau langage », comme dit
un personnage de Molière, que « la soupe fait le soldat » donc l'homme, qu'il est
mal vu de « cracher dans la soupe », être « soupe au lait » ou « gros plein de
soupe » n'ont à l'inverse jamais été bien perçus. Le « mange ta soupe » de
l'enfance raisonne encore comme quelque chose de peu agréable. Mais on dit
aussi que la soupe réchauffe le corps, on évoque ses parfums avec nostalgie…
Notre relation à la soupe est donc bien ambivalente. On ne s'étonnera pas qu'elle
ait suscité autant d'engouements que de rejets.
Comment est apparue la soupe et quelle a été alors sa place dans la société ?
Tout commence quand l'homme découvre le feu, le pot et le pose sur le feu. Il y
met de l'eau et ce qu'il trouve autour de lui, végétaux de cueillette, viandes de
chasse… Il y rajoutera plus tard les légumes du potager, et de la viande, surtout
du porc, pour le gras, ou de l'huile s'il est trop pauvre. Au sens premier, on sort
de ce pot un potage, plat roboratif. A l'origine, la soupe est la tranche de pain
que l'on met dans l'assiette, que l'on arrose des bouillons de légumes ou de
viande obtenus, sur laquelle on dispose légumes et lard en morceaux. On dit
alors qu'on trempe la soupe. On a là un plat unique qui fait à lui seul le repas -
pain, légumes et graisse - qui fut pendant des siècles le repas du peuple.
Le sens du mot évoluant, la soupe finit par signifier, à la fin du Moyen-Age, le
contenu de l'assiette : morceaux de pain et de légumes, bouillon et graisse, une
texture rustique. L'histoire de la soupe est celle de l'évolution de cette
composition et de cette texture.
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